Et puis jaillit le doute …dans l’incertitude de l’esprit
Ecrit par Muepu Muamba
En cette période les mythes se désintègrent et se noient dans le vide.
« Sortez-nous de là ! », hurlent les jeunes Thaïlandais. En ce moment la jeunesse du monde entier, descendent dans les rues avec les casseroles de protestations. Les sortir de quoi ? De cette souillure que traine l’humanité, depuis sa soi-disant sortie de l’animalité et sa marche vers l`humain. Elle prétend avoir laissé la violence aux bêtes…
Toma Muteba Luntumbue est parmi ce que j’appelle mes partenaires du doute. Et d’où me vient le doute ? Peut-être de mon grand-père maternel, qui m’avait enseigné d’écouter avec attention et respect, les êtres vivants mobiles ou immobiles. Et de ne pas se laisser submerger l’esprit et le cœur, par la parole bavarde. Il m’avait aussi prévenu contre la vanité et la suffisance de soi.
Le respect, de mon vis-à-vis, est essentiel á la construction de l’humain. J’écoute et j’apprends. Ainsi, j’ai profité de ma rencontre inattendue, à Bruxelles, avec Tame Iti, – une sorte de Black panthère – de mers lointaines, relâché provisoirement de prisons néo-zélandaises uniquement pour participer à la rencontre de Bruxelles, afin d’apprendre sur la Nouvelle-Zélande et son propre peuple de Maori. Sur leurs souffrances, mais aussi sur les coutumes de son peuple. Je découvris aves surprise agréable, que leurs coutumes ressemblaient un peu à celles du pays d’où je venais. Tame Iti faisait partie des acteurs de la pièce Tempest de Shakespeare, jouait en maori. Cette somptueuse rencontre, je la devais à la générosité de Toma Luntumbue, qui avait suggéré au Théâtre Flamand, organisateur de la rencontre, de m’inviter.
Tame Iti me révéla aussi qu’il portait les noms de ces petits-enfants, mais également ceux de ces enfants, gravés sur le corps pour les protéger… Ces hommes – le metteur en scène, Lemi Ponifasio et Tame Iti – venus de terres de confins se rebellèrent contre ceux qui leur reprochaient de terreur. Ils répliquèrent avec véhémence, dans le débat : « Savez-vous à quelle terreur l’Europe a soumis nos vies ? » Cette question les Africains peuvent, aussi la poser, avec raison. Civilisation, histoire et barbarie…
Toma Luntumbue participe à ce débat houleux. Il questionne l’art et l’histoire, dans ses travaux pratiques et théoriques, avec lucidité. Ce qui est très important en cette période de multiples controverses, où les mots semblent quelque fois avoir une commune amnésie. Déconstruire est le mot fétiche de ces temps incertains et de débat postcolonial. Toma Luntumbue participe au débat pas seulement en tant qu’artiste, mais en tant qu’enseignant aussi. Il essaye de donner aux jeunes des outils nécessaires à la compréhension de notre monde. Ce qui nous lie depuis plusieurs années, c’est cette recherche de la vérité, de compréhension entre les êtres humains.
Les questions à Toma Muteba Luntumbue, qui vit à Bruxelles, ont été posées par Muepu Muamba et Cornelia Wilß au printemps 2021
Le thème de la restitution vous occupe depuis des décennies. Diriez-vous que les institutions politiques, muséales et scientifiques belges ont évolué dans le sens d’une plus grande réceptivité face aux demandes de restitution ? Ou avez-vous, en parallèle et comme réaction, vu naître aussi une réticence, voire résistance ? Par rapport à cette dernière question, et si oui, où est-ce que ces résistances se situent et quels sont leurs arguments ?
Toma Muteba Luntumbue: Le débat en Belgique, me semble actuellement trop belgo-centré. Il y a une tendance à vouloir penser et parler à la place de l’Autre. Ce qui me paraît emblématique de la Belgique, c’est un opportunisme doublé d’opacité face à l’emballement médiatique qui a suivi la publication du rapport Sarr-Savoy commandé par le Président français Macron. Je remarque qu’il n’a jamais été question durant tout le processus de rénovation du Musée de Tervuren, d’une réelle politique de restitution des objets culturels spoliés durant la colonisation. On ne sait d’ailleurs pas précisément de quelle instance politique cette compétence relève. Le Musée de Tervuren a eu durant les dernières années une politique d’infiltration et de neutralisation de la diaspora, en s‘accaparant tout l’espace médiatique et en voulant maitriser les termes, et les normes du dialogue avec les personnes issues des communautés africaines.
PAS DE RÉELLE POLITIQUE DE RESTITUTION
Dans d’autres pays, depuis au moins trois décennies, les lois et éthiques ont évolué rapidement. Les musées au Canada, aux États-Unis, en Australie et en Nouvelle-Zélande ont toujours été à l’avant-garde de la problématique de la restitution des objets culturels dans toute sa complexité et se sont positionnés en leaders pour assurer l’intégrité morale de leurs collections et tenter de corriger les torts historiques.
Même si pendant longtemps les « communautés autochtones » ont peiné à faire valoir leurs droits sur les objets de leur patrimoine, voire même la possibilité d’y avoir accès, face aux grands musées toujours réticents à se voir déposséder des collections qui fondaient leur notoriété, il y a eu des avancées concrètes décisives. La Nouvelle-Zélande a promulgué, dès 1975, une loi (Protected Objects Act), visant à réglementer l’exportation d’objets protégés relatifs à la culture, l’histoire ou la société maorie, et de permettre le retour d’objets exportés ou volés illégalement.
La loi sur la protection et le rapatriement des sépultures (NAGPRA) des peuples autochtones a été promulguée dès 1990 (NAGPRA 1990) aux États-Unis. Même si elle n’a pas d’application internationale, cette loi, dont l’enjeu relève surtout de l’éthique et des droits humains, a eu grande influence sur beaucoup de communautés autochtones dans d’autres pays qui s’en inspirent pour mener des actions.
Si des initiatives semblables avaient existées en Belgique, cela se saurait. Le discours officiel actuel sur la restitution du crâne du roi congolais Lusinga, décapité par le Général belge Storms, me semble totalement insincère sur le plan éthique et politiquement opportuniste.
S’il y a quelques réactions hostiles aux restitutions elles demeurent dans leur grande majorité, assez fébriles et reposent sur le même argument fallacieux porté sur l’impréparation et l’incompétence des professionnels de musées en Afrique subsaharienne à conserver leur propre patrimoine.
Pourriez-vous, en quelques mots, m’expliquer l’élan que le débat a pris en RD Congo ? Est-ce qu’un tel consensus est souhaitable, voire préalable à toute réception d’oeuvres ou restes humains restitués ?
Ce processus demande du temps. Au Congo, tout le monde ne prend pas encore la mesure ni la portée symbolique des restitutions. Le Président Tshisekedi a adopté jusqu’à présent une position pragmatique, prudente et mesurée qui lui permet d’éviter de tomber dans le piège d’un débat complexe et hautement idéologique. S’il considère que la question de la réclamation des biens culturels ou celle de la réparation n’est pas urgente, je pense que ce n’est pas seulement pour des raisons diplomatiques et politiques. Il n’y a réellement pas de raison de se précipiter dans un processus compliqué alors la RDC fait actuellement face à des problèmes hautement plus dramatiques. Je crois personnellement que la restitution demande une prise de position forte parce qu’elle est justement politique même si la logique diplomatique veut qu’il n’y ait ni vainqueur ni vaincu. Pour la RDC, elle permettrait de sortir notamment d’une situation de mendicité face aux institutions belges, qui tiennent à maintenir une hégémonie scientifique à travers une politique de coopération technique très instrumentalisée politiquement.
A Kinshasa, il y en a qui pensent qu’une restitution massive et immédiate serait insensée. Objectivement, si tout le patrimoine congolais dispersé dans le monde était rapatrié, il deviendrait terriblement encombrant. Pour des raisons notamment anthropologiques, d’abord, il faut bien se rendre compte combien ces objets traversent une crise de sens. Affirmer qu’ils constituent un patrimoine universel est un raccourci et une imposture intellectuelle. Les objets les « plus puissants » ou les plus chargés symboliquement sont considérés comme diaboliques par les églises évangéliques. Les religieux en tout genre ne voient pas d’un bon œil l’exhibition publique de ces objets culturels qui s’ils ont pu changer de significations depuis leur départ du territoire de la RDC, n’en demeurent pas moins problématiques dans un contexte de mondialisation culturelle. Toutes ces disjonctions montrent l’ampleur du chantier épistémologique qui s’ouvre avec le retour des artefacts culturels. En RDC beaucoup de personnes souhaitent se départir du paradigme colonial des « tribus » ou ethnies. La RDC est tellement immense et diverse. L’identité congolaise est très complexe, riche d’une diaspora qui pèse de plus en plus sur la marche de la société. Le nouveau Musée national ne peut de ce fait n’être qu’un pâle reflet, une caricature de la RDC d’hier, d’aujourd’hui, de demain.
Dans les pays occidentaux, les musées répondent à une logique des parcs d’attractions. Fallait-il importer ce modèle ici ?
Le MNRDC (Musée National de la République Démocratique du Congo), c’est d’abord un nouveau bâtiment de prestige, un signe architectural dans l’espace de la ville de Kinshasa, peu importe en réalité, ce qu’il recèle (Seulement 400 œuvres sont présentées au public parmi les dizaines de milliers de pièces conservées par l’Institut des musées nationaux (45.000, dont 12.000 ont été transférés dans les réserves du nouveau musée), peu importe sa politique scientifique. C’est avant tout un symbole. Pour l’instant, cela semble suffire de dire qu’il existe enfin un musée national digne de ce nom : point. Mais, il ne faut pas être injuste vis-à-vis d’une institution naissante qui doit s’inventer dans un contexte historique particulièrement imprévisible.
LA PÉDAGOGIE DE L’ART EN AFRIQUE
Quels sujets (et avec quel matériel) vous intéressent actuellement ? Quels sont les projets spécifiques que vous poursuivez ?
Mon travail artistique prend depuis des années déjà plusieurs formes indissociables. J’ai une pratique personnelle en tant qu’artiste et commissaire d’exposition indépendant. Je suis enseignant dans deux écoles supérieures d’Art en Belgique. Je mène aussi mes recherches théoriques de façon indépendante, en tant qu’historien de l’art au carrefour de la théorie postcoloniale et de la culture visuelle.
J’essaye de questionner à partir d’un large éventail d’images la possibilité d’une réappropriation critique du domaine imprimé, mass médiatique et de l’imaginaire visuel du Congo. Je collecte pour les analyser puis les cannibaliser les images coloniales et postcoloniales. J’ai remarqué qu’en dehors de leur contexte, privées de leur destination première, certaines images enfuies, des archives oubliées deviennent autonomes, incapables de s’inscrire dans une économie de sens. Actuellement, c’est la pédagogie de l’art en Afrique qui m’intéresse, dans une perspective de pratiques de créations collectives et communautaires. J’aimerais initier ou participer à l’élaboration d’un nouveau programme d’enseignement supérieur artistique pluridisciplinaire et expérimental à Kinshasa, ma ville natale.
En 2017, vous avez été le directeur artistique de la cinquième Biennale de Lubumbashi. Quelle a été votre expérience là-bas ?
Lors de ses trois premières éditions, la Biennale de Lubumbashi, Rencontres de Lubumbashi, était centrée sur la photographie. Elle ne durait que quelques jours, mais nous l’avons fait évoluer dès 2015 vers une Biennale pluridisciplinaire et étendue sa durée à un mois. Le maître mot était de présenter les meilleurs artistes du Congo et montrer le meilleur de l’art contemporain international au public congolais. L’idée n’était pas d’imiter les Biennales occidentales mais de faire de ces Rencontres une biennale vraiment populaire, un événement plus ouvert, véritablement dédié à la population locale et non pas indirectement calé sur l’agenda occidental. Lors de la seconde Biennale en 2017, l’accent a été mis sur la jeune création congolaise et sur la visibilisation des femmes artistes. Organiser un tel événement en RDC est toujours un défi. A cause des changements très rapides, de l’incertitude générale. Il faut vite s’adapter, éviter de n’écouter que les opinions négatives, inventer des solutions avec les gens, plutôt que se plaindre de leurs disfonctionnements.
LUBUMBASHI – LE VISAGE LAID DU CAPITALISME ET DU COLONIALISME
Lubumbashi est la deuxième agglomération urbaine, à 3.600 km de la capitale Kinshasa, c’est le point de contact entre l’Afrique centrale et l’Afrique australe. La ville de Lubumbashi doit sa création et son développement à la découverte d’importants gisements de cuivre et à leur mise en exploitation par l’Union Minière du Haut-Katanga. Bâtie, en 1910, sur un plan quadrillé à l’américaine, tout y a été conçu et construit en fonction de la cupidité capitaliste. L’essor prit par l’industrie cuprifère en fera un grand centre administratif et commercial, à proximité des mines et des usines. L’édification des grands travaux, des routes, des cités modernes, des usines, n’avait pour but que de faciliter le développement des entreprises coloniales telles que la Société générale et ses filiales (CSK, UMHK, Forminière, Géomines, etc.). Depuis l’indépendance du Pays, en 1960, Lubumbashi a connu des transformations profondes. Quatre décennies de marasmes économiques, de violences politiques et sociales vont progressivement déconstruire l’espace de la ville, produire des rapports sociaux nouveaux. En 2003, après une décennie dans la tourmente, le licenciement de 1000 agents de la Gécamines, dans le cadre du projet de libéralisation du secteur minier conçu par la Banque mondiale, va provoquer un séisme social.
On peut dire sans exagérer que la région de Lubumbashi est un des endroits du monde où le capitalisme et le colonialisme ont montré leurs visages les plus laids. Car l’activité minière intensive a détruit le territoire. Elle constitue toujours une menace pour la santé des populations, déstructure les communautés et ne leur apporte pas le bonheur. C’est une vérité cruelle, à laquelle, il faut faire face. On voit aujourd’hui, des centaines de camions remplis de minerais qui traversent la ville, quasi clandestinement, vers une destination inconnue. Nous vivons dans un système économique des plus troubles. Cette opacité est le produit du capitalisme mondial. Il existe des résistances locales qu’il faut savoir écouter. La ville congolaise cristallise les dynamiques de la société contemporaine, ses maux, ses errements. Les populations congolaises survivent grâce à des moyens de vie précaires. Laissées pour comptes des politiques publiques, qui échouent à construire des villes susceptibles d’améliorer leurs existences, développer des infrastructures, avec pour priorités, l’accès à l’eau potable, l’assainissement, la réduction des risques sanitaires, la création d’emplois, les communautés urbaines subissent les violences de l’exclusion économique, dans les marges des villes.
EN TANT QUE SUJET DÉLOCALISÉ, CE QUI M’INTÉRESSE C’EST L’ART, ET LES ARTISTES DANS LEUR SINGULARITÉ AVANT TOUT.
Quel rôle joue de telles biennales en Afrique ?
Les Biennales visent à apporter de la visibilité aux artistes sur le plus national, continental et international. C’est le cas de la Biennale de Dakar, Dak’Art, au Sénégal, une des plus anciennes biennales dans le monde. Dak’Art est une Biennale qui s’affiche comme panafricaine. Elle est très appréciée par les artistes africains même si souvent ils critiquent son organisation chaotique. Elle s’est focalisée prioritairement sur les artistes du continent et de la diaspora. C’est un lieu de rencontre stimulant pour les créateurs vivant en Afrique et ceux éparpillés dans le monde. Il existe de plus en plus de Biennales dans le monde, plus de 150, je crois. Est-ce bien ou mal ? Actuellement, il existe deux biennales artistiques à Kinshasa. On pourrait penser que c’est trop mais, ce n’est pas gênant si on pense que Kinshasa est une mégapole très étendue. Les deux Biennales kinoise sont à l’initiative de jeunes artistes qui ont suivi l’exemple de la Biennale de Lubumbashi. Depuis, quelques années on a vu apparaître beaucoup de collectifs artistiques. Les artistes se regroupent parce il n’existe pas de soutien public structurel. Par ailleurs, les jeunes artistes sont tentés de se tourner vers des structures comme l’Institut français ou l’Union européenne mais le danger pour eux est qu’en se conformant aux attentes de leurs soutiens européens, ils se retrouvent déconnectés de la réalité congolaise. Une des points positifs à souligner dans la plupart des nouvelles Biennales, c’est leur volonté d’inclusivité et l’attention plus grande portée aux communautés locales. C’est le cas à Douala, à Lubumbashi. A Kampala, en Ouganda, il semble y avoir une très belle dynamique d’intégration à la ville.
Est-il encore contemporain de parler d’art africain ?
C’est une question à laquelle plus d` une personne essaye de répondre. L’Afrique est bien trop diverse pour offrir une image d’un art homogène. Je suis toujours étonné de l’image que certains organisateurs d’expositions essaient de donner des artistes du continent africain. Beaucoup de commissaires utilisent des sujets-prétextes soit pour projeter leurs propres goûts soit pour nourrir l’industrie culturelle de formes facilement digestibles. Dans des paysages culturels devenus tellement composites, l’exposition est le terrain pour contester les idéologies productrices de jugements de valeurs et de classifications ethnocentriques. Personnellement, je suis pour un art sans identité. Les expositions que j’ai organisées même quand elles regroupaient majoritairement des artistes venant d’Afrique, n’ont jamais prétendu démontrer une unité basée sur une identité continentale. En tant que sujet délocalisé, ce qui m’intéresse c’est l’art, et les artistes dans leur singularité avant tout.
Quel rôle joue le panafricanisme dans la conscience des artistes en Afrique et dans la diaspora ?
Le panafricanisme reste un repère essentiel dans les ténèbres néolibérales, c’est un héritage auquel beaucoup de gens se réfèrent pour étayer leurs luttes aujourd’hui. D’autre part, beaucoup d’artistes assument leur hybridité, portent un regard critique sur cette philosophie qui de leur point de vue appartient au passé et comprend une part d’hypocrisie. Aujourd’hui, chacun essaie d’échapper aux assignations de toutes sortes, y compris aux certitudes identitaires.
Alors le concept d’identité est obsolète ?
La notion d’identité est un piège lorsqu’elle est abordée sous le signe de l’unicité ou de l’authenticité. Les sociétés et les cultures sont des processus à transformation continue. Elles ne peuvent être que le fruit de « mélanges », elles ne peuvent être qu’hybrides. Il ne saurait y avoir d’identité sans mutabilité, sans syncrétismes. Dire cela, c’est une banalité. Cependant, malgré que le fait que nous vivions dans un monde d’interconnexions, le point de vue d’où l’on parle est d’une importance capitale. J’ai personnellement le sentiment d’habiter un corps congolais, mon aspect physique reste le marqueur de mon altérité dans un monde globalisé. A son époque W.E.B. Du Bois, parlait de cette impression de devoir toujours « se regarder à travers les yeux des autres ». Quelles grilles de mesure de ce qui m’est proche et de ce qui m’est lointain ? Entre être en relation et être à côté. Quels liens existent-ils avec les lieux et les territoires vécus avec mon identité individuelle ou collective ? L’absence d’identité crée la panique et le chaos. Le propre de la globalisation est la formation de nouvelles identités ségrégatives empêchant les solidarités. Le philosophe Paulin Hountondji parlait-lui de « sortir de la bibliothèque coloniale » et de déconstruire la fiction coloniale. Édouard Glissant, lui nous encourageait à nous construire une Identité-relation, instable, mouvante, créatrice, fragile, au carrefour de soi et des autres.
Biographie
Historien de l’art, artiste-plasticien, chercheur indépendant, commissaire d’exposition indépendant Toma Muteba Luntumbue enseigne à l’Ecole de Recherche Graphique (ERG) et à l’Ecole nationale supérieure des arts visuels de La Cambre, à Bruxelles en Belgique. Ses principaux champs de recherches se sont concentrés sur l’exhibition de l’altérité culturelle dans les musées des anciens empires coloniaux européens, à la falsification de la mémoire et à l’iconographie dans le contexte postcolonial et, aussi aux mutations territoriales de la ville dans la mondialisation. Il a été le Directeur artistique de la 4e et 5e Biennale de Lubumbashi, en 2015 et 2017, en RD. Congo. En tant que commissaire, Toma Muteba Luntumbue a organisé les expositions suivantes : « Métasporas », à PointCulture, Bruxelles, « Ligablo » à la Bibliothèque royale de Belgique (2010-11), « Transferts» au Palais des Beaux-Arts, Bruxelles (2003), « Africa screams » au Centre culturel De Markten, Bruxelles (2003), « Table Manners », Kapelle van groeningen, Kortrijk (2003), « Démarcations » au Centre Wallonie Bruxelles, Paris (2005), « Exitcongomuseum » au Musée royal de l’Afrique centrale, Tervuren (2000-2001). En tant qu’artiste, Toma Muteba Luntumbue a à son actif plusieurs expositions personnelles, notamment, à la Cité Miroir à Liège 2017, à La Chaufferie à Strasbourg, à l’Aquarium à Valenciennes, à la Galerie Extraspazio à Rome.